Cathédrale Saint-Paul de Liège : histoire et trésors cachés en plein centre-ville

Cathédrale Saint-Paul de Liège : histoire et trésors cachés en plein centre-ville

Un joyau gothique au cœur de Liège

Impossible de traverser le centre-ville de Liège sans lever les yeux vers la Cathédrale Saint-Paul. Nichée entre les rues du Collège et de la Régence, elle s’impose par son clocher élancé et ses façades de calcaire. Pourtant, beaucoup de Liégeois passent devant sans vraiment prêter attention à ce monument qui, pourtant, regorge d’histoire et de petites merveilles souvent ignorées. Retour sur un édifice emblématique à (re)découvrir sans tarder.

Une cathédrale… qui ne l’était pas

Cela surprend souvent, mais la Cathédrale Saint-Paul n’a pas toujours été une cathédrale. Avant la Révolution française, elle était simplement l’une des sept collégiales de la ville. Située à proximité immédiate du cloître du chapitre, elle servait de lieu de culte prestigieux mais secondaire par rapport à la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert, effondrée sous les coups de la Révolution.

Ce n’est qu’en 1803 que l’on choisit l’église Saint-Paul pour relever le flambeau épiscopal. Le choix fut loin d’être évident : d’autres collégiales étaient dans la course. Mais la position centrale de Saint-Paul et son état de conservation ont pesé dans la balance. L’édifice fut ainsi restauré et complété pour endosser son nouveau rôle de cathédrale de Liège.

Une architecture témoin des siècles

La construction de Saint-Paul a débuté au XIIIe siècle dans un style gothique dit « rayonnant ». On y retrouve les grandes ogives, les vitraux en lancette et les arcs-boutants typiques de cette époque. Au fur et à mesure des siècles, des ajouts et restaurations ont façonné son apparence actuelle.

Au XIXe siècle, un important chantier de restauration fut entrepris, notamment sous l’impulsion de l’architecte Jean-Charles Delsaux. C’est à cette époque que l’on ajouta le clocher néogothique au sommet de la tour sud. Si vous trouvez qu’il tranche un peu avec le reste du bâtiment, c’est normal : il date de 1852.

La grande nef, avec ses voûtes élancées et sa luminosité surprenante, est un vrai plaisir pour les yeux. Contrairement à d’autres édifices plus sombres, ici la lumière naturelle traverse de magnifiques vitraux, dont certains modernes installés après la Seconde Guerre mondiale.

Le Trésor de la cathédrale : un musée caché

Beaucoup l’ignorent, mais un musée se cache derrière les murs de Saint-Paul : le Trésor de la cathédrale. Accessible via une entrée discrète rue Bonne-Fortune, il abrite une collection impressionnante d’art sacré lié directement à l’histoire religieuse de Liège.

Parmi les pièces les plus précieuses :

  • Le buste reliquaire de saint Lambert, en argent repoussé, datant du XVIe siècle. Un chef-d’œuvre de l’art mosan.
  • Des chapes en brocart aux motifs floraux datant du Moyen Âge.
  • Plusieurs manuscrits enluminés, dont un Antiphonaire orné de miniatures exceptionnelles.
  • Le fameux retable anversois en bois polychrome du début du XVIe siècle, restauré avec minutie.

La visite (payante, mais abordable) est bien agencée, avec des cartels explicatifs clairs. Elle permet de comprendre l’importance de Liège comme centre religieux et artistique dès le haut Moyen Âge.

Des statues à découvrir, du sol à la voûte

Il suffit parfois de lever les yeux pour faire une rencontre inattendue. À Saint-Paul, les chapelles latérales comme les niches du chœur regorgent de statues en bois polychrome, en pierre ou en marbre, souvent passées inaperçues.

Un bon exemple : la statue de saint Michel terrassant le démon, splendide sculpture en bronze du XVIIe siècle, nichée dans une chapelle latérale. Le détail du diable gisant sous l’archange vaut à lui seul le détour.

Autre surprise : les clés de voûte du chœur ont été sculptées avec finesse. Elles représentent, entre autres, les symboles des Évangélistes, mais aussi quelques visages humains dont l’expression interpelle encore aujourd’hui.

Un orgue, deux histoires

L’orgue de la cathédrale mérite qu’on s’y attarde. Ce majestueux instrument, visible sur la tribune ouest, date pour partie du XIXe siècle, fruit du facteur d’orgues toulousain Aristide Cavaillé-Coll. Mais il intègre aussi des éléments anciens hérités de l’orgue baroque d’origine installé dans l’ancienne cathédrale détruite.

Avec ses plus de 4000 tuyaux, l’orgue est toujours en activité. Il accompagne les offices, mais sert aussi lors de concerts ponctuels. Ne manquez pas le rendez-vous estival du festival « Orgue en Ville », souvent l’occasion d’entendre cet instrument dans toute sa puissance.

Un refuge de silence dans la ville active

Liège est une ville vivante et sonore. Entre la Place Cathédrale, les commerces et les arrêts de bus, l’agitation est quasi permanente. Pourtant, en poussant la lourde porte de la cathédrale, on entre dans un autre monde : une bulle de calme, propice à la contemplation comme à la simple pause.

Le lieu reste ouvert en journée pour les visiteurs. Quelques bancs permettent de s’asseoir sous les voûtes gothiques. Le chœur, accessible librement, invite à la méditation, quelle que soit votre croyance.

Et si vous êtes attentif, vous entendrez parfois quelques notes d’orgue pendant les répétitions. Un moment suspendu dans le tumulte urbain.

Astuces pratiques pour la visite

Envisagez une visite en matinée ou en fin de journée, pour éviter les groupes touristiques. L’entrée à la cathédrale est gratuite, mais un petit don à la sortie est toujours bienvenu, surtout pour les efforts d’entretien toujours en cours.

Le Trésor, quant à lui, est accessible du mardi au dimanche, avec des horaires qui varient selon la saison. Un audioguide est disponible en plusieurs langues, dont le français bien sûr — et il vaut la peine, ne serait-ce que pour les anecdotes autour des objets exposés.

Bon à savoir : des visites guidées sont parfois proposées par des bénévoles passionnés. L’idéal pour creuser un peu plus l’histoire du lieu.

Un monument vivant

La Cathédrale Saint-Paul n’est pas qu’un monument figé dans le passé. Elle vit au rythme des événements culturels (expositions, concerts, conférences) et des célébrations religieuses. Il n’est pas rare qu’un chœur vienne y répéter, ou qu’une installation artistique temporaire dialogue avec les pierres séculaires.

Elle incarne à la fois la mémoire de Liège et son élan contemporain. En plein centre-ville, elle rappelle que le sacré et la beauté, loin d’être réservés à certains initiés, peuvent encore aujourd’hui parler à chacun, de manière directe, simple et sans artifices.

Alors, la prochaine fois que vous passerez par la Place Cathédrale, prenez cinq minutes pour y entrer. Pas besoin d’être croyant pour apprécier le silence, admirer les vitraux ou simplement marcher sur des dalles foulées par des générations de Liégeois.

La cathédrale vous attend. Vous verrez : elle a encore beaucoup à raconter.